• Textes littéraires et siècles d'Histoire 10

    b- De l’épopée à l’histoire : La chronique et l’Histoire

    - Les origines de l’histoire :

    Dès les origines de la littérature, les hommes ont été fascinés par le prestige du passé. Les auteurs ne s’y sont d’ailleurs pas trompés puisque pour mieux toucher leur public, ils se sont réclamés régulièrement de l’histoire, c'est-à-dire du document authentique dont ils allaient enfin divulguer le contenu en y puisant la matière de leurs œuvres. Grâce aux faits et gestes des ancêtres, aux vies d’hommes exceptionnels, ils prétendaient bâtir des récits véridiques qui proposaient des modèles aux nouvelles générations. Mais le fond de vérité qui servit de base à leurs récits fut bientôt « enrichi » d’épisodes merveilleux entièrement inventés.

    Par ailleurs, le phénomène historique des croisades suscita une abondante littérature. Les croisades sont les principales caractéristiques du Moyen âge, surtout au Xe et au XIIe siècle, durant lesquels une forme particulière d’exaltation spirituelle trouve son expression la plus directe d’autant plus qu’elle constitue le vivant témoignage du sursaut de L’Europe, la première manifestation de la renaissance depuis la chute de l’empire romain. Vers 1100, Richard Le Pèlerin écrit en vers français le récit de la première croisade (c’est surtout ce cycle de la croisade qui s’est développé), mais les chansons de geste qui composent ce cycle ne peuvent être considérées comme des œuvres « historiques » : l’exaltation des valeurs religieuses et chevaleresques l’emportent sur le souci de relater un événement réel. Il faudra attendre Villehardouin, le premier grand chroniqueur pour que soit composée au début du XIIIe siècle une œuvre à caractère historique inspirée par le thème de la croisade.

    La naissance de l’histoire de France :

    Pendant très longtemps, l’histoire n’a pas eu d’existence indépendante. Écrite en latin ou en vers français, sous la forme de petits poèmes inspirés par la vie des Saints, soit sous la forme de grands poèmes à prétention historiques, elle ne présentait pas une narration objective des faits politiques et sociaux. A la fin du XIIe siècle, l’histoire écrite en prose française apparaît parmi de nombreux chroniqueurs, dont nous citons les plus importants : Villehardouin, Joinville et Froissart.

    - Les chroniqueurs du XIIe et XIIIe siècle : témoins du Moyen Âge

    Villehardouin et Joinville sont des hommes d’action, barons et guerriers, qui ont inauguré la prose au Moyen Âge, ils lui ont donné d’emblée les qualités militaires : brièveté, clarté et énergie.

     

    villehardouinMaréchal de Shampagne, Villehardouinest un mémorialiste sérieux et précis (XIIe siècle). Ses chroniques (1198-1207) sont des rapports militaires et justificatifs qui rapportent les grandes lignes des événements de la IV croisade. Sur le plan du style, on ne remarque aucun étalage de sensibilité ni de pittoresque : pas de détails personnels. La manière de raconter est froide et précise, les expressions commodes et ne varient pas. 

     

    joinvilleBiographe aimable et fidèle de Saint Louis (XIIIe siècle), Joinville fut son ami et son confident. Son livre Vie de Saint Louis comprend un recueil de souvenirs épars sur le roi et un recueil détaillé de la croisade de Damiette. Contrairement à Villehardouin, Joinville ne décrit guère les épisodes et particulièrement ceux auxquels il a été mêlé et dont il grossit naïvement l’importance (détails de la bataille Mansour). Mais ses souvenirs sont étonnants de fraîcheur et de vérité. Ils fournissent un tableau de toute la société féodale au XIIIe siècle, moins raide et plus mondaine, éprise de fêtes, de belles étoffes et beaux coup d’épées.

     

    froissartFils d'un peintre en armoiries. Froissart fut un clerc cultivé qui préférait la vie et les plaisirs. Il devint par la suite poète et fut engagé à composer la chronique des guerres du temps, activité qui le rendit historien officiel à la cour de Philippa de Hainaut, l'épouse d'Édouard III d'Angleterre. Il composa une oeuvre historique dans laquelle il met en valeur les prouesses des chevaliers et de ses protecteurs. Il s'inspira beaucoup de l'oeuvre d'un autre chroniqueur, Jean le Bel, mais son écriture se basa essentiellement sur des souvenirs personnels et des témoignages nombreux. Ses qualités d'écrivain masquent ses défaillances d'historien, sa prose est sobre et vigoureuse quand elle décrit des scènes de guère, mais colorés et éclatante lorsqu'elle évoque la vie luxueuse des cours princières.